Immobilier: l’interdiction d’achat pour les étrangers n’a pas affecté Montréal
15 mars 2023Immobilier: l’interdiction d’achat pour les étrangers n’a pas affecté Montréal
Jean Numa Goudou
12 mars 2023 à 12h39 - Mis à jour 13 mars 2023 à 17h48 4 minutes de lectureFirme de courtiers immobiliers, agents et Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ), tous s’accordent pour dire que la Loi fédérale qui interdit depuis janvier l’achat de propriété par des investisseurs étrangers n’influence pas le marché montréalais et ne serait pas à l’origine du ralentissement du marché immobilier. Les taux d’intérêt un peu trop élevés seraient plutôt la source de la douche froide qui frappe le secteur actuellement.
Nick Fiasche évolue dans le domaine de l’immobilier depuis 48 ans et a déjà été vice-président de la Chambre immobilière de l’est de Montréal. Il est aujourd’hui vice-président ventes Résidentiel Commercial et propriétaire de l’Équipe Nancy Forlini Re/Max Solutions, dans l’est de Montréal.
«J’ai connu les changements et les fluctuations du marché depuis ces années-là, avec des taux d’intérêt autour de 19 ou 20%, la grande récession des années 1990, etc.», rappelle-t-il en entrevue avec Métro.
Il fait remarquer que ce sont «quelques agents qui avaient une niche et qui vendaient aux acheteurs étrangers» qui sont plus affectés par la nouvelle législation.
La situation actuelle n’est pas liée forcément aux investisseurs d’ailleurs. Ce n’est pas partout que cela fonctionne; dans l’Ouest canadien, oui, car ces acheteurs étrangers sont plus orientés vers cette région au Canada, ainsi que dans l’ouest du grand Montréal.
Nick Fiasche, vice-président ventes Résidentiel Commercial et propriétaire de l’Équipe Nancy Forlini Re/Max Solutions
Dans l’ouest, l’entrée en vigueur de la loi peut avoir eu un effet sur la vente de quelques agents qui avaient un marché de niche, selon M. Fiasche. Dans l’est, ce dernier estime à 2 ou 3% la proportion du marché de l’immobilier qui est affectée.
De son côté l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québecde (APCIQ) estime dans un communiqué diffusé le 6 mars, que les taux d’intérêt jouent un rôle dans la situation actuelle. Et plus on est à l’est, moins le marché est exposé à la baisse du dynamisme. «Le marché de Québec est moins exposé à la baisse de dynamisme des investisseurs, moins nombreux, et à la législation visant à exclure des acheteurs étrangers entrée en vigueur au 1er janvier, contrairement à la RMR de Montréal», y constate Charles Brant, directeur du Service de l’analyse de marché de l’APCIQ.
Pour lui, l’effet de la hausse majeure des taux d’intérêt – entre 4,5 et 5% – commence à se faire sentir à Québec, au même titre que la plupart des autres marchés de la province. Comme Nick Fiasche, M. Brant évoque un début de «normalisation de l’activité après plusieurs débuts d’année qui ont enregistré des niveaux de ventes exceptionnels».
L’application de la loi fédérale est venue réduire la compétition sur le marché des ventes des maisons aux enchères, avec des étrangers aisés qui proposaient plus que la valeur réelle des demeures. Cela a fait en sorte qu’il y a aujourd’hui plus de maisons sur le marché.
Ce qui arrive, c’est que la personne pense que sa maison coûte plus cher, le vendeur est encore en haut et l’acheteur se dit qu’on va attendre que cela baisse.
Nick Fiasche, vice-président ventes Résidentiel Commercial et propriétaire de l’Équipe Nancy Forlini Re/Max Solutions
Rappelons que la RMR (Région métropolitaine de recensement) de Montréal a enregistré 2996 ventes résidentielles sur son territoire au cours du mois de février 2023, soit 32% de moins qu’en février 2022.
Une vente perdue, mais un marché positif
L’agent immobilier Ange M. Bruno, courtier immobilier résidentiel de Sutton synergie, a perdu une vente qui pourrait lui rapporter près de 20 000$ en raison de l’entrée en vigueur de la loi fédérale. Son client, à statut d’étranger, voulait vendre sa résidence pour une plus grosse.
Mais l’agent – qui fait surtout affaire avec les communautés culturelles, qui sont plus acheteuses que vendeuses – ne s’en plaint pas. «Le marché est bon pour moi, dit M. Bruno. La quantité de transactions a augmenté, les acheteurs des communautés immigrantes achètent plus, j’ai moins de compétition, mon travail est plus simple.»
De plus, il n’y a de moins en moins de de prospecteurs, c’est-à-dire des gens avec de grosses sommes qui font des promesses d’achat pour ensuite vendre les promesses, souligne-t-il.