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L’aide fédérale à l’achat d’une première maison, un échec en devenir?

25 jan. 2020

Mesure phare du dernier budget fédéral, l’incitatif s'adressant aux acheteurs d’une première habitation ne donne pas les résultats escomptés. Quelques mois après son entrée en vigueur, à peine 3000 nouveaux acheteurs se sont prévalus du programme à l’échelle du pays, qui vise à en rejoindre 100 000 sur une période de trois ans.

L'Incitatif à l'achat d'une première propriété doit permettre aux acheteurs de pouvoir compter sur une nouvelle source de fonds et ainsi réduire leurs mensualités hypothécaires sans accroître leur fardeau financier.

Jusqu’ici, aucun chiffre n’avait encore été rendu public par le gouvernement et la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHLSociété canadienne d’hypothèques et de logement) à propos du nombre de Canadiens ayant profité de cette mesure depuis sa mise œuvre, le 2 septembre dernier.

Au 31 décembre 2019, nous avons approuvé près de 3000 demandes, confirme par écrit le bureau du ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, Ahmed Hussen.

Au rythme où vont les choses, le programme est loin d’être en voie d’atteindre sa cible prévue de 100 000 acheteurs lorsqu’il prendra fin dans environ deux ans et demi.

Un édifice à condominiums en construction dans un quartier résidentiel de Vancouver.

PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE / DARRYL DYCK

Le ministère de la Famille et la SCHLSociété canadienne d'hypothèques et de logement refusent d’y voir un échec. D’ailleurs, les deux fournissent une réponse écrite en tout point identique : L’Incitatif est disponible depuis seulement quatre mois, et ce, durant l’automne et l’hiver. Les saisons où l’activité sur le marché de l’habitation a tendance à s’intensifier approchent, nous nous attendons donc à ce que le nombre d’acheteurs de propriétés pouvant accéder à l’Incitatif augmente de façon significative.

Alors qu’Ottawa a prévu consacrer 1,25 milliard de dollars sur trois ans à cette initiative, les 3000 participations ne représentent pour l’instant que plus de 55 millions de dollars en fonds engagés, indique la SCHLSociété canadienne d'hypothèques et de logement.

Un échec qui n'est pas surprenant, affirme une économiste

Ce programme fait partie d’un lot de mesures visant notamment à courtiser les millénariaux.

Annoncé dans le budget de mars 2019, l'Incitatif à l’achat d’une première propriété est entré en vigueur tout juste avant la récente campagne électorale.

C’est un flop qui était à prévoir. Je ne suis pas du tout surprise, soutient Sherry Cooper, économiste en chef de l’agence hypothécaire Dominion Lending.

Une maison neuve à vendre dans la région d'Ottawa.

PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE / SEAN KILPATRICK

Le programme prévoit que la SCHLSociété canadienne d'hypothèques et de logement prête entre 5 %, pour une habitation existante, et 10 %, pour une construction neuve, de l’hypothèque de cette propriété. Comme ce prêt est remboursable plus tard, les paiements mensuels des acheteurs sont moins élevés.

Par exemple, une famille veut acheter une maison de ville neuve de 400 000 $ et dispose d'une mise de fonds de 20 000 $. En vertu du programme, le couple pourra demander à la SCHLSociété canadienne d'hypothèques et de logement de prendre en charge la somme de 40 000 $, ce qui représente 10 % du prix de la maison, sous forme d’un prêt avec participation.

Le couple n’aura à emprunter que 340 000 $ à son prêteur hypothécaire, ce qui représente une économie de 228 $ par mois ou de 2736 $ par année par rapport à l’hypothèque qui aurait été contractée sans l’incitatif de la SCHLSociété canadienne d'hypothèques et de logement.

Cette mesure est souvent présentée par les libéraux comme une des solutions pour permettre à des milliers de jeunes familles d’entrer dans un marché immobilier difficile d'accès, comme ceux des régions de Toronto et de Vancouver.

L'impact du programme est plutôt limité. À Toronto, par exemple, le prix de vente moyen des propriétés dépassait 830 000 $ le mois dernier.

Or, le programme s’adresse uniquement aux ménages gagnant moins de 120 000 $ par an et limite l’emprunt hypothécaire à 480 000 $.

Les critères du programme sont fortement dissuasifs dans plusieurs marchés, souligne Sherry Cooper. C'est une erreur de conception. Le gouvernement doit y voir, et rapidement.

À quand les changements?

Le premier ministre Justin Trudeau lors d'une annonce sur le logement abordable à Vancouver

PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE / JONATHAN HAYWARD

Tout ça est symptomatique de quelque chose, croit l’économiste Jean-Pierre Aubry. Ils n’ont pas pris les moyens pour que ce soit fort. C’est pour ça que le bébé électoral a du mal à grandir.

L’Incitatif à l’achat d’une première propriété venait à peine d’entrer en vigueur en septembre que les libéraux promettaient dans leur programme électoral d’y apporter des correctifs.

Nous augmenterons aussi la valeur admissible à près de 800 000 $ dans les régions où les maisons coûtent le plus cher, comme la région du Grand Toronto, de Vancouver et de Victoria.

Extrait du programme électoral du Parti libéral du Canada

La lettre de mandat du ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, de qui relève la SCHLSociété canadienne d'hypothèques et de logement, précise également que lorsque la dynamique des marchés change dans différentes régions, le programme doit être adapté aux différentes réalités.

À quel moment le gouvernement procédera-t-il aux changements? Quand entreront-ils en vigueur? Le ministère se garde bien de donner une indication.

Ils ne disent pas comment ils vont rencontrer leurs objectifs d’ici trois ans, déplore Jean-Pierre Aubry. Quand il n’y a pas de reddition, les gens commencent à se demander qu’est-ce ce qui ne va pas? Alors, ça veut dire que le programme n’a pas été très bien planifié et on peut se questionner pour la suite.

Marc Godbout, Radio Canada



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